“C’est en parlant, en tout cas, qu’il faudra [à l’écolier] presque toujours défendre ses intérêts, soutenir sa pensée, convaincre ses interlocuteurs” 

Jean Zay

La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen le proclame : la “libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme”. Le texte en conclut que “tout citoyen peut donc parler librement”. Et pourtant, en raison du stress, par manque de confiance ou par la conviction que leur légitimité fait défaut, 8 personnes sur 10 renoncent à prendre la parole en public. Ce mal a même un nom : la glossophobie.

Si la jeunesse est l’avenir et qu’il faut l’écouter, que penser de cet avenir si la jeunesse redoute de prendre la parole ? La récente réforme du baccalauréat a réussi ce tour de force de multiplier les épreuves orales, sans inscrire un seul enseignement de la prise de parole en public au programme. Or, parler en public s’apprend. Il y a des techniques et des références à connaître, des erreurs à ne pas commettre, de bons réflexes à acquérir par la pratique. Sans cet apprentissage, comment un lycéen peut-il espérer réussir ces épreuves orales du bac ? Et demain, comment ce citoyen pourra-t-il faire entendre sa voix ?

Dans quelques mois, des milliers d’adolescents se rendront à l’oral du brevet ou au Grand oral du bac. La différence entre eux doit-elle se faire en fonction de l’apprentissage que chacun aura reçu “à la maison” ? Faut-il que se perpétuent ces inégalités ? N’est-ce pas l’une des fonctions essentielles de l’école de donner à chacun le socle de connaissances et de savoir-faire suffisants pour mener sa vie de citoyen ?

Enseigner l’art oratoire, l’éloquence ou plus sobrement la prise de parole en public, c’est s’engager pour la réussite de chacune et chacun, car il n’y a rien de plus discriminant que la parole ; c’est également abandonner cette idée fausse que la parole est une pratique élitiste. Quoi de plus communément partagé que l’expression d’une opinion ? Apprendre l’art oratoire, ce n’est certainement pas apprendre à construire des discours creux emplis de mots complexes. Tout au contraire même, c’est viser à produire des discours clairs et ordonnés qui s'adaptent à l’auditoire. Car apprendre la rhétorique, c’est à la fois apprendre à se mettre à la place de ceux qui écoutent et apprendre à construire un raisonnement ; c’est autant faire preuve d’empathie et de psychologie que de rigueur et de logique. N’y a-t-il pas là les fondements d’une vie en société à la fois riche et animée mais également respectueuse et apaisée ?

Nous pouvons collectivement changer l’avenir de la jeunesse en améliorant sa formation. Alors transformons les programmes, instaurons l’enseignement de la parole pour tous ! 

Au verbe, citoyen !